Michael Sayegh Ă©tait un client, puis est devenu un ami au fil des annĂ©es – un acteur clĂ© de l’industrie, plein de ressources et de bons conseils. Un cuisinier hors pair, au passage.
Très heureux de vous partager son entrevue, ce matin!
Bon week-end!
b.
En quelques mots, qui es-tu et que fais-tu ?
Avant tout, je suis gérant d’artistes. Je travaille avec des projets comme Half Moon Run, Ouri, Hollow Coves, Billianne, Valence, Grand Eugène et plusieurs autres.
Chez Lighter Than Air, on a aussi développé une étiquette de disque et une division de production de spectacles. Donc, dans mon rôle, je fais aussi pas mal de A&R et je m’assure que tout roule comme il faut.
Mais la gestion d’artistes, ça reste vraiment notre cœur de métier. Quand quelqu’un me demande ce que je fais, je réponds simplement que je suis gérant d’artistes.
En quoi consiste concrètement ton travail au quotidien ?
Je vois mon temps se diviser en deux.
Une grande partie de mes journées est consacrée à faire tourner Lighter Than Air comme entreprise, m’assurer que la compagnie dans son ensemble avance dans la bonne direction. Travailler avec l’équipe sur tout ce qui touche au marketing, au catalogue, aux tournées, etc. Aider à traduire et transmettre les intentions des artistes aux différentes équipes avec qui on collabore, mais aussi à adapter nos propres pratiques. Bref, faire en sorte que la logistique quotidienne d’un artiste en tournée ou en sortie d’album soit fluide et sans tracas. Quand on réussit cette partie-là de notre travail, l’artiste peut se libérer l’esprit et se concentrer entièrement sur sa création — plonger dans l’écriture ou la performance — sans avoir le poids de tout ce qui entoure sa carrière.
L’autre volet est beaucoup plus créatif. C’est là qu’on agit comme conseillers : on propose des idées, on pousse celles qui existent déjà plus loin, on apporte un regard extérieur sur la création — que ce soit pour les choix de singles, l’identité visuelle, des collaborateurs potentiels ou des idées complètement inattendues. Notre but, c’est de bâtir un univers autour de chaque artiste. Ça part toujours de la musique, mais ça se déploie dans tout ce qu’ils font et tout ce qu’ils touchent.
Ou, on passe beaucoup de temps à alléger le poids des tâches qui ne s’arrêtent jamais autour d’un artiste… notre apport créatif c’est ce qui nous a donné la job au départ — et ce qui nous garde là par la suite.
À ton avis, quel est le rôle d’un gérant et sa pertinence en 2025 ?
Un gérant, en 2025, doit réussir à faire trois choses en même temps :
- Élever la création en apportant une vraie valeur en A&R et en idées ;
- Élargir le reach de cette création avec un marketing efficace ;
- Alléger la charge de tâches autour de l’artiste, pour qu’il puisse se concentrer sur sa musique et son univers créatif sans avoir le poids de toutes les « to‑do » qui viennent avec une carrière.
Quels sont les grands défis (actuels ou à l’horizon) qui se rattachent au métier… ou l’industrie musicale de façon générale ?
En ce moment, on vit vraiment un changement de garde. Il y a une nouvelle génération de gérants et de pros de l’industrie qui comprennent qu’on est tous dans le même bateau. Qu’on doit s’élever les uns les autres et avancer ensemble.
Mais il y a encore une partie de l’industrie qui reste accrochée à une vision très capitaliste, dans laquelle si toi, tu gagnes quelque chose, cela veut dire que moi, j’ai moins. Cette mentalité-là amène une approche assez égocentrique dans les relations d’affaires, ce qui me met mal à l’aise. Cette vieille façon de faire est encore bien présente et l’industrie en subit encore les contrecoups aujourd’hui.
Cela dit, ce n’est pas forcément une question d’âge : il y a des nouveaux venus qui arrivent avec les mêmes mentalités que l’ancienne garde et, à l’inverse, des gérants et pros en poste depuis longtemps qui prônent cette idée de collaboration bien avant que le mouvement soit devenu plus répandu.
Quelle est ta plus grande fierté ou ta plus grande réalisation des dernières années ?
La communauté. On a la chance incroyable d’avoir été au cœur de la vie de plusieurs artistes. Ils font partie de notre communauté, et nous de la leur. We are all supporting each other in the simple act of togetherness.
J’ai toujours dit que je voulais que LTA soit un monde où tous les artistes avec qui on travaille pourraient s’asseoir ensemble autour d’un souper. Et ça s’est littéralement passé chez nous. C’est ça dont je suis le plus fier.
Quel(s) conseil(s) donnerais-tu à un.e artiste qui envisage une collaboration avec un gérant ?
Avant même les idées qu’un gérant peut apporter, avant de juger sa capacité à exécuter des tâches pour toi, demande-toi : est-ce que cette personne voit le monde comme moi ? Est-ce qu’on partage le même système de valeurs ?
Un gérant te représente dans des centaines de petites conversations et de situations. Ça demande beaucoup de tact et d’intelligence. Mais surtout : est-ce que cette personne va être une extension du feeling que tu veux laisser aux gens ? Ta réputation, c’est tout. Et le gérant va laisser une impression auprès de chaque personne avec qui il interagit. Assure-toi que tu es à l’aise que ce feeling-là devienne une extension de toi.
BONUS : Quel conseil donnerais-tu au Michael Sayegh d’il y a 10 ans ?
Prends ton temps. Même si tout le monde crie le contraire, il n’y a pas d’urgence. Dix ans plus tard, je pense que j’ai encore besoin de ce conseil parfois.